Emmanuel Chabrier apprend très tôt le piano et le violon. Le jeune homme continue en parallèle des études de droit et la musique.
Licencié en droit, il commence une carrière de fonctionnaire au ministère de l’Intérieur à Paris. Aimant la vie artistique parisienne, il se lie avec des poètes, Paul Verlaine entre autres, des peintres, Auguste Renoir, Claude Monet, Édouard Manet et des musiciens : César Franck, Henri Duparc, Ernest Chausson, Vincent d’Indy, Gabriel Fauré, Camille Saint-Saëns. Il devient rapidement indispensable dans les salons parisiens grâce à son formidable jeu pianistique.
Il choisit à 40 ans de se consacrer entièrement à la musique, essentiellement au théâtre lyrique car il est un grand admirateur de Wagner ; il compose aussi des œuvres pour le piano qui font de lui l’égal des plus grands. Son sens de l’harmonie, du rythme, des couleurs servent à merveille ses talents d’orchestrateur.
Chabrier demeure l’un des musiciens les plus personnels de sa génération.
Suite Pastorale (1888)
I. Idylle
II. Danse villageoise III. Sous bois
IV. Scherzo-valse
Chabrier choisit quatre pièces de ses Dix Pièces Pittoresques pour piano composées en 1881 pour en faire une version orchestrée. Il en résulte un chef d’œuvre de grâce poétique et de légèreté, de vivacité et de truculence, de raffinement et de variété. Rarement la maîtrise de l’orchestrateur n’a éclaté avec une telle plénitude.
La première audition a lieu en 1888 sous la conduite du compositeur.
La première pièce, Idylle, dont le thème est murmuré par la flûte sur un accompagnement pizzicato, se pare d’une fluidité et d’une transparence remarquables.
La Danse villageoise tire habilement partie des contrastes entre les tonalités mineures et majeures ; sa carrure rythmique très marquée est comme un écho du terroir auvergnat cher à l’auteur.
Sous-bois jouit d’un grand pouvoir suggestif grâce à la délicatesse de l’instrumentation.
Enfin, l’allégresse rustique du Scherzo-Valse, nuancée un instant par la tendresse discrète de son trio, conclut dans le tourbillon de la fête cette magistrale réussite.
Camille SAINT-SAËNS (1835-1921)
Enfant prodige, Saint-Saëns compose de nombreuses pièces et acquiert rapidement une renommée significative. En 1871, il crée la Société Nationale de Musique, qui a pour dessein de promouvoir les compositeurs français contemporains. Il prend position en faveur dupoème symphonique, genre nouveau notamment représenté par Franz Liszt. Maître de l’orchestration, Saint- Saëns laisse un opus considérable en musique de chambre, mélodies et formes chorales. En 1877, son opéra Samson et Dalila remporte un succès immense. Saint-Saëns obtient plusieurs récompenses pour l’ensemble de son œuvre, participe à des projets de musique de scène, et écrit la première musique de film (pour L’Assassinat du duc de Guise ).
Morceau de Concert pour Harpe et Orchestre, op. 154
Valentine CAILLIAU, harpe
membre de l’Orchestre Symphonique de Clichy depuis 2014
Saint-Saëns conçoit cette œuvre comme une « rapsodie », pièce improvisée par les « rapsodes », bardes itinérants de l’antiquité grecque, à l’instar d’Orphée avec sa lyre. Ce Morceau de Concert au caractère libre, conçu comme une grande improvisation, met la harpe à l’honneur, lui permettant d’explorer toutes les possibilités techniques de l’instrument.
Cependant, Saint-Saëns prône « de la forme avant toute chose » : on peut donc imaginer que le compositeur a tout de même suivi le schéma classique de la symphonie.
L’Allegro non tanto initial présente un premier thème en Sol majeur, énergique et volontaire, suivi par l’Allegretto moderato qui développe une longue phrase en La mineur, mélodique et légère : la Grèce antique y est évoquée par l’utilisation du mode éolien, utilisé à cette époque.
Trois sonneries soudaines de cors annoncent le mouvement central Andante sostenuto : c’est la partie la plus méditative et mystérieuse de l’œuvre, une mélopée délicate en Mi majeur, comme un second mouvement de symphonie.
Un roulement de timbales pianissimo mène au Molto allegro quasi presto, évoquant le scherzo virtuose d’une symphonie de Beethoven.
Vient alors un grand crescendo qui conduit à la reprise du thème initial, assurant l’unité de l’œuvre après ce voyage poétique librement construit.
Le final Molto allegro conclut l’œuvre dans la virtuosité, avec des envolées lyriques de la harpe et des contrastes dynamiques saisissants.